Le psychoendoctrinement était une chose étrange, au moins autant qu’elle était utile.
Par des séances d’hypnoses en demi sommeil directement liées nerveusement au patient, des informations, des images, des concepts, parfois même ce qui aurait été digne d’être appelé « souvenirs », étaient directement transféré à sa mémoire. Ce système permettait à l’Imperium de l’humanité de réaliser nombre de prouesses techniques ; un état de fait dont les Space Marines étaient le vibrant exemple. Cela était encore plus vrai pour ceux qui passaient par la Deathwatch.
Chaque membre de l’escouade avait, durant son terrible entrainement suivi auprès des autorités de cet ordre, appris par cœur nombre d’éléments parfois terrifiants, parfois anodins, sur des races entières dont ils n’avaient jamais soupçonnés l’existence. Certaines étaient tolérées, et à la grande surprise des fils de l’Empereur, plusieurs d’entre elles étaient même considérées comme « exploitables » par l’Inquisition.
Pour bon nombre des autres à propos desquelles toutes les conclusions arrivaient au résultat : « à exterminer », chaque image capturée, chaque information obtenue, était directement implantée dans une zone bien particulière du cerveau des Space Marines, regroupant à la fois mémoire et zone consacrée à l’analyse logique, et bien entendu, la violence.
Aussi, grâce au psychoendoctrinement, chaque Space Marine de l’Escouade avait les connaissances basiques concernant la très mystérieuse race des Nécrons.
Chacune des images que l’on parvenait à en obtenir était une rareté, car elle était excessivement secrète et mystérieuse, outre le fait qu’elle ne laissait jamais de trace de son passage, brouillant bien souvent les capteurs ou enregistreurs des autres espèces. Il n’était même pas certain que cela était fait intentionnellement, car la technologie honnie de ces créatures semblant affamées de mort était un mystère absolument complet. Les plus hauts prêtres du Mechanicum auraient tué pour obtenir ne serait-ce que le plus basique de leur fusil, et cela s’était toujours avéré impossible. A chaque fois qu’un de leur combattant était vaincu au-delà de cette horripilante capacité à s’autoréparer, il disparaissait purement et simplement du champ de bataille, ne laissant même pas un boulon derrière lui.
Quelques Marines de l’escouade avaient malgré tout une connaissance plus qu’académique des Nécrons. Pourtant, Azador savait que le moment venu, aucun ne tiendrait à en parler.
Lorsque Wulfric quitta le pont de commandement, il était absolument livide.
Il servait l’Imperium depuis qu’il était venu au monde, avant même d’être sélectionné sur Fenris pour devenir un des glorieux fils de Russ, car même enfant il avait tenu à être le plus utile possible à son village. Il avait servi son chapitre de toutes ses forces, puis, quelque peu assagi par l’expérience malgré un tempérament qui ne changerait jamais, il avait donné à la Deathwatch son cœur et son âme comme il l’aurait fait à son Primarque en personne. Wulfric était capitaine, et à ce titre, il avait déjà mené plusieurs escouades vers leur devoir, préférant l’ivresse du terrain au seul champ d’instruction.
Il servait la chambre militante de l’Inquisition depuis 461 ans selon les standards de Terra. Lors des nombreuses missions auxquelles il avait pris part, il avait reçu des hauts seigneurs inquisiteurs des ordres qui lui avaient parus absurdes, stupides, contradictoires, ou semblant même être à l’opposé de son objectif. Pourtant, lorsque les pièces du puzzle s’étaient imbriquées, tout cela avait toujours fini par avoir du sens. Il n’avait jamais vu d’inconvénient à l’idée qu’une mission exige qu’il se sacrifie : donner sa vie était une chose basique pour un Space Marine si cela devait amener la victoire. Tout, oui tout finissait toujours par avoir un sens dans ces missions à la nature au départ si souvent obscure.
En ce jour, alors que le capitaine Space Wolf s’approchait de la moitié d’un millénaire d’existence, il n’avait jamais entendu un plan aussi éloigné de ce qu’il pouvait seulement imaginer. La conversation tournait en boucle dans son crâne comme une mélodie insupportable lui rongeant la cervelle.
- Vous vous attendez… à ce que j’obéisse… à «
ça » ?! avait demandé Wulfric sur un ton glacial et néanmoins troublé par l’ébahissement.
- Je comprends vos objections capitaine, mais le but qu’il y a derrière tout ça est clair. Il vous apparaitra limpide à vous aussi lorsque…
- Vous nous envoyez au cœur d’une nécropole xénos encore endormie pour que nous… Êtes-vous complètement cinglé ?! Nous sommes à des milliers de parsecs du secteur où la vrille de la flotte-ruche ravage nos forces les plus endurcies, dont certaines constituées de nos frères. Nous sommes en train de perdre cette bataille ! Et vous me dites que la mission censée nous aider à poursuivre nos actions contre cette menace, c’est… Non, ce n’est même pas la peine de poser la question… Vous êtes vraiment cinglé ! Si vous pensez que je vais envoyer mon escouade là-dessous après ces élucubrations vous êtes un fou doublé d’un idiot !
- Capitaine, je vous en prie, dit Azador comme s’il essayait de calmer un enfant turbulent. Vous connaissez l’importance que revêt le secret pour l’Inquisition. Vous avoir informé du plan préparé pendant des mois avec le seigneur Talaran vous donne des obligations auxquelles vous ne pouvez vous soustraire. Je sais que c’est difficile mais je dois vous demander de me faire confiance.
Wulfric était resté interdit pendant quelques instants, comme s’il avait entendu un mot inconnu. Est-ce que cet homme était seulement sérieux ?
- Confiance, répéta le Space Wolf.
Confiance… je ne crois pas avoir jamais entendu ce mot prononcé dans une phrase contenant aussi « Inquisition ». Je crois comprendre, au contraire, ce qui se passe ici. Nous sommes les sujets d’un test dont vous avez le secret, vous et vos hautes autorités. Vous allez…
- Cette mission entière est un test, pour moi y compris ! s’était alors emporté l’interrogateur. J’ai engagé une vie entière consacrée à l’étude des Nécrons dans cette seule mission et je suis moi aussi passé à travers le feu et la mort, perdant beaucoup de camarades auxquels je tenais ! Nous parlons d’une race excessivement dangereuse, certes, mais les tenants et aboutissants de cette mission ne vous seront révélés qu’en temps voulu, comme cela a toujours été le cas ! Nous ne savons pratiquement rien d’eux et pourtant vous pouvez vous dire que je suis ce qui se rapproche le plus d’un expert concernant cette menace. Je descendrai avec vous sur cette planète et vous accompagnerai, pas à pas. Ne venez pas me soumettre des objections au seul motif que vous ne comprenez rien à ce qui s’organise ici ! J’ai consacré trop de travail pour en arriver à cette journée !
Le Space Wolf s’était alors levé. Lentement, il avait contourné la table à projection holographique qui créait une image légèrement brouillée de la planète située en dessous d’eux, se plantant devant Azador. Wulfric était en armure, et Azador qui n’était guère grand pour un humain lui arrivait tout juste au niveau de l’estomac. Il avait dans l’œil une fureur meurtrière à peine contenue ; il semblait décidé.
Prenant une grande inspiration, l’interrogateur leva doucement la tête de façon à regarder le fils de Russ dans les yeux. Il n’y avait aucun défi dans ce regard, juste une détermination implacable, ainsi qu’une fatigue certaine.
- Il y a des milliers de façons de me faire disparaître sans éveiller le moindre soupçon, dit doucement Azador. Des centaines de méthodes pour faire disparaître un corps et au moins le double d’excuses à trouver pour expliquer ma mort. Si vous faites ça correctement, vous ne serez probablement jamais inquiété. Alors, si vous devez le faire, faites-le vite.
Wulfric serra le poing, ne répondant que par un souffle, léger grognement animal trahissant une réflexion intense menée par un esprit bouillant de rage. Puis, alors qu’il semblait sur le point d’exploser, il s’en retourna en marchant avec une lenteur qui trahissait la tension extrême qui l’animait. Tournant toujours le dos à Azador, juste avant de franchir les portes du pont de commandement, il dit :
- Je vais préparer mon escouade et les informer de ce qu’ils doivent savoir. Nous nous retrouverons à la navette.
Il s’était alors apprêté à franchir la porte mais l’interrogateur l’avait retenu d’une parole.
- Capitaine… C’est moi qui ai demandé à ce que vous commandiez cette mission.
Wulfric avait légèrement tourné la tête dans sa direction à ces mots.
- J’ai déjà servi auprès de membres de votre chapitre par le passé. J’ai appris auprès d’eux une chose importante, non, vitale, même.
Le Space Wolf resta silencieux.
- Tous les chapitres de Space Marines attachent à leur honneur une importance aussi grande que celle de leur survie. Certains plus que d’autres. Mais un très petit nombre d’entre eux comprend la nécessité de faire preuve d’une certaine… ouverture d’esprit, lorsque les temps sont troublés par des choses que l’on ne maîtrise pas. Les enfants de Fenris sont en cela ceux qui ont remporté ma plus grande admiration. S’il ne devait rester qu’un seul chapitre de Space Marines dans tout l’Imperium, j’aimerais que ce soit le vôtre. Je sais que les éléments que je vous ai révélés sont obscurs pour le moment, mais je vous en prie,
faites-moi confiance.Wulfric franchi la porte sans même se retourner, disant simplement : « A la navette, dans dix minutes ».
L’interrogateur inspira profondément. Ses mains tremblaient et ses battements de cœur étaient si intenses qu’il pouvait presque sentir sa poitrine bouger à chaque fois. Puis, au bout d’un moment, il se força à sourire comme il le faisait à chaque fois et s’en retourna vers ses quartiers. Lui aussi devait se préparer.
***
Chacun des membres de l’escouade était prêt, son équipement parfaitement préparé. Wulfric avait été extrêmement bref et concis durant le briefing. Il leur avait dit qu’ils avaient à tout prix besoin d’une chose contenue sur ce monde et qu’ils allaient donc la chercher. Sans sourciller, il les avait informés de la nature de l’adversaire qui les attendait au plus profond des ténèbres de ce triste caillou. Plusieurs avaient tiqué, et ils s’étaient entre regardés avec des mines déformées par la surprise. Sandro avait lancé à Wulfric un regard interrogateur et celui-ci lui avait simplement répondu en faisant non de la tête, d’un air las.
Eriksson avait manqué d’en venir aux mains avec le capitaine lorsqu’on lui avait dit que les détails tactiques ne leur seraient révélés qu’une fois au sol.
Le Space Wolf n’avait alors pas réagi comme il le faisait d’habitude, par la force brute, un brin de provocation, et une autorité assise par sa seule puissance et son grade. Il avait simplement regardé le Carcharodon, son visage taillé à la serpe, ses yeux noirs comme la nuit et son crâne totalement chauve. Un instant il avait semblé détailler les tatouages tribaux qui recouvraient l’ensemble de la partie basse de son crâne, puis il lui avait finalement dit en appuyant particulièrement sur le dernier mot : « Ne me fais pas perdre patience, gamin. »
Connaissant le caractère du Carcharodon, les autres Marines s’étaient tenus prêts à s’écarter, peut-être même à intervenir. Étrangement, cela n’avait pas été nécessaire. Eriksson avait juste rendu un regard furieux au capitaine, avant de finalement mettre son casque. Il avait été le seul à comprendre à ce moment-là que le rejeton de Fenris l’aurait tué dans l’instant s’il avait senti les seuls prémices d’une désobéissance.
La dixième minute fut atteinte à l’instant même où Azador arriva, accompagné par une dizaine de serviteurs lobotomisés. La moitié d’entre eux étaient des serviteurs d’arme. Les autres étaient munis de pinces énormes, et ils étaient gros comme des Ogryns. Ils transportaient un étrange caisson dissimulé sous une double couche de toile. L’interrogateur lui-même avait délaissé son habituelle tenue ample et officielle semblant sortir tout droit d’une usine de l’Administratum pour une armure carapace complète. Il portait en dessous un simple treillis couleur sable. Une fine lame pendait à son côté et un pistolet de facture extrêmement étrange était comme intégré à son gantelet gauche. Il se déplaçait aisément dans cette armure, preuve qu’il avait bel et bien servi sur le terrain plus d’une fois.
- Il nous faut embarquer ceci avec nous, dit Azador en désignant l’énorme caisson d’un petit geste du bras. En se serrant un peu mes serviteurs et le matériel rentrerons dans une navette de type Arvus. Ils devront atterrir au même endroit que nous.
- J’ignorais qu’il y avait un « nous » dit Quintus, l’Ultramarine, d’un ton lourd de sous-entendus.
- Vous n’aviez pas à le savoir, du moins jusqu’à présent, dit l’interrogateur d’un ton parfaitement neutre. Je vous accompagne, car chaque avancée devra se faire sous ma supervision. Une organisation millimétrique va être nécessaire, et les données risquent d’évoluer en permanence. Il est donc prévu que je donne les instructions en fonction des avancées de l’escouade. Si je meurs avant la capture de l’objectif ou si le caisson est détruit, considérez que la mission est un échec. Allons-y, si vous le voulez bien.
Les Astartes furent tous contrariés d’entendre que leur mission allait être passablement compliquée par cette présence. Survivre en territoire hostile avec des ennemis très lourdement armés n’était jamais chose facile, à plus forte raison quand il y avait un objectif spécifique à aller chercher. Devoir protéger à la fois un homme, un de ces humains si fragiles, ainsi qu’un objet dont on ignorait tout, cela promettait de rendre cette mission aussi extrême que possible.
- Autant espérer traverser une marée d’Orks avec un verre en cristal à la main sans le casser, marmonna Quintus, l’Ultramarine.
Le fils de Guilliman était l’un des plus jeunes de l’équipe, Ambrosius étant le seul à être encore moins âgé que lui. Ses cheveux étaient courts, taillés de façon militaire et extrêmement ordonnée, et son visage encore dépourvu de cicatrices avait des traits nobles et sévères comme ceux des bustes des généraux d’une époque révolue. Il avait tout de la recrue fraichement nommée frère de bataille, et plusieurs membres de l’équipe se demandaient ce qu’il faisait parmi eux, la Deathwatch n’étant censée que recruter les meilleurs.
Tenaka eut un petit rire en entendant Gregor dire quelque chose. Ses traits porteurs des gênes des peuplades de l’extrême Orient de l’ancienne Terra donnaient en permanence l’impression que le Mantis Warrior, héritier des White Scars, avait l’air amusé. Mais le Hammer of Dorn l’avait cette fois-ci bel et bien fait rire de façon audible par tous. Quintus n’allait sans doute pas apprécier lorsqu’il saurait ce qu’il avait dit, pensa Azador.
Les Marines prirent tous place dans la navette et s’arrimèrent, suivis de l’interrogateur qui se muni d’un masque censé aider à la respiration en milieu hostile. Personne n’y avait songé, mais l’atmosphère était à peine respirable quelques minutes pour un simple humain. Le lichen sec qui poussait sur les quelques zones rocheuses de la planète ne suffisait pas à rendre sa maigre atmosphère vivable, excepté pour des êtres aux capacités surdéveloppées. Les serviteurs lobotomisés entrèrent d’eux-mêmes dans leur propre navette, y déposant la caisse avec une délicatesse toute mécanique. Lorsqu’ils décollèrent, les deux navettes filèrent vers le monde qui semblait n’être que le cadavre d’une planète et non un astre digne de ce nom.
Tous l’avaient appris en étudiant la menace Nécron : avoir l’air d’un cadavre n’empêchait pas d’être dangereux.
***
Dans la navette Aquila, les Marines discutaient sur le canal privé de leurs armures, impatients d’être en bas, sans savoir à quel point ils allaient plus encore vouloir quitter ce monde rapidement.
- Tu ne sais donc que ce que le psychoendoctrinnement t’a appris sur eux ? demanda Ryanor au Hammer of Dorn. J’espérais avoir des détails d’une autre nature. Mon chapitre n’a jamais eu affaire à eux.
- Le mien oui, dit simplement Quintus en vérifiant les attaches magnétiques de son casque. Mon instructeur m’a parlé d’un monde, Damnos. Il m’a juste dit qu’ils étaient redoutables, et il n’était pas du genre à se laisser impressionner facilement.
- Cela ne nous avance guère, dit simplement Tenaka. Il faudra nous contenter de ce que nous avons.
- Une clairvoyance admirable, commenta Eriksson avec un cynisme évident. Dommage qu’elle vous ait fait défaut à Badab.
La navette redevint immédiatement silencieuse. Cette provocation monstrueuse était une insulte et un appel au sang à peine voilé. Les Mantis Warriors avaient été dans le mauvais camp au début de ce conflit sécessionniste, et de nombreuses batailles les avaient opposés aux Carcharodons. L’inquisition ayant reconnu la bonne foi des héritiers de Jagathaï Khan, ils avaient fini par recevoir le pardon des autorités inquisitoriales. Mais contrairement aux inquisiteurs qui pardonnaient rarement, les Carcharodons ne pardonnaient jamais.
- Tu as raison, répondit finalement le Mantis Warrior sans rien ajouter.
Le Carcharodon y vit un aveu de faiblesse. Plusieurs autres y virent une forme de courage et de sagesse. Deux d’entre eux étaient parfaitement indifférents à la conversation.
- Et toi, le croisé de Dorn, dit finalement Sandro en tentant de prendre un ton amical. Ton chapitre qui voyage tant a déjà rencontré ces horreurs ?
- Oui.
La réponse avait été immédiate, et dénuée de toute trace d’émotion. Ambrosius n’y avait rien ajouté.
- Et… peux-tu nous en dire un peu plus ?
- Évitez leurs lames.
Sandro éclata de rire avant de constater que le Black Templar était sérieux.
- Tu ne développes guère tes réponses mon ami, dit Gregor d’un air sévère ; tu n’estimes pas que nous sommes dignes d’avoir les mêmes informations que toi ?
Ambrosius soupira alors profondément, avant de reprendre la parole.
- Certains d’entre eux nous dépassent en force brute, et leurs lames passent la céramite avec aisance. Une personne… haut placée de mon chapitre a perdu sa main contre un de leurs chefs. Face à eux il n’y a de sécurité ni à distance ni de près. Si ce monde se réveille et que nous sommes encore dessus, nous ne reviendrons pas. Je n’ai rien à ajouter.
Les propos qui avaient été tenus n’avaient rien eu de défaitistes. Ambrosius avait été factuel, précis, et bref. De la part d’un guerrier capable d’occire un Prince Tyranide, c’était particulièrement parlant.
- N’as-tu rien à ajouter, Nolt ? demanda finalement Ryanor.
Le Son of Medusa était le seul qui n’avait pas prononcé un seul mot depuis leur entrée dans la navette. Sandro se fit même la réflexion comme quoi il n’avait pas prononcé un mot depuis leur départ du monde jungle.
Celui-ci enleva son casque, et tous observèrent les traits que le fils de Ferrus Manus montrait si rarement. Sa peau avait une pâleur cadavérique là où elle n’était pas remplacée par des plaques d’acier, ou peut-être était-ce de l’adamantium. Ses deux yeux avaient été remplacés par des bioniques et plusieurs cicatrices étaient visibles sur le haut de son cou. Il était parfaitement chauve, et sa bouche excessivement fine donnait l’impression d’avoir été tracée au scalpel. Il aurait été difficile de contredire un simple humain qui l’aurait décrit comme « monstrueux ».
Le Son of Medusa produisit un petit outil sorti d’on ne sait où et revissa une légère mécanique interne à son casque à hauteur de quelques microns. Sans jeter un œil à qui que ce soit dans l’équipage, il dit simplement « Non » avant de remettre son casque. Le silence se fit à nouveau.
Sandro prit alors la parole.
- Si un jour, on vous engage toi et Ambrosius pour écrire l’histoire de l’Imperium dans son ensemble, vos efforts combinés ne feront pas dix lignes.
Wulfric éclata alors immédiatement de ce grand rire franc et dénué de toute moquerie dont il avait le secret, et si personne ne put le voir car tous étaient casqués, plusieurs d’entre eux sourirent.
Ce fut à ce moment-là que le choc d’une terrible vibration secoua toute la navette, et qu’un léger bruit d’explosion extérieur se fit entendre.
- Nous n’avons même pas passé la haute atmosphère ! hurla Wulfric sur le réseau Vox général. Azador ! Vous aviez dit que ce monde était en sommeil ! Sale fils de…
- Il l’est ! Il ne peut que l’être bon sang ! Nous l’avons fait observer pendant des mois ! C’est impossible que ce soit eux !
- C’est la navette Arvus qui a un problème, les informa leur pilote depuis son propre micro. Il y avait un léger nuage de sable, rien de problématique, mais… Qu’est-ce que c’est que ces monstres ?!
Azador, et toute l’équipe qui avait travaillé avec lui sur ce plan si méticuleusement préparé pendant presque une année, étaient toujours partis du principe qu’un monde tombeau comme ceux des Nécrons était un monde mort. Bien entendu, certaines planètes avaient trouvé le moyen de renaître, développant d’épaisses jungles et une vie animale florissante, au fil des millénaires. Mais bien souvent, les mondes identifiés comme porteurs d'une nécropole de cette espèce n'étaient que des sphères de roches et de poussière incapables d'abriter plus que quelques bactéries. Rien, absolument rien des nombreuses séances d’observation qui avaient eu lieu auparavant n’avait été révélé sur celui-ci. Quelques tempêtes de sable de faible intensité survenaient parfois, mais cela n’était pas suffisant pour troubler le long sommeil de ses terribles gardiens. A défaut de Nécron, Gemelis IV était censé être un monde mort.
Mort !
En cela, l’interrogateur et son équipe au grand complet s’étaient lourdement trompés. Et les seuls êtres vivants de cet astre de sable hostile venaient de leur souhaiter la bienvenue.
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